Dans l'intimité des peintres : Henri MARTIN
Le peintre Henri Martin écrit à son ami le peintre Henri Le Sidaner
(Photo : Henri Martin retouchant les décors du Capitole de Toulouse par Germaine Chaumel) Cette publication est consacrée au travail d’Henri Martin dans le Lot, plus précisément à Labastide du Vert où il possédait une maison. Nous remercions chaleureusement Marie-Anne Martin-Destrebecq qui a accepté d’évoquer ce thème, avec l’aide précieuse de Yann Farinaux-Le Sidaner qui a exhumé pour nous les lettres d’Henri Martin à son grand-père, le peintre Henri Le Sidaner, ainsi qu’une rare photographie de famille que l’artiste avait envoyée à son ami.
« En 1898 Henri Martin commence à chercher une grande maison dans l'Aveyron, le Lot ou le Tarn et Garonne. En 1900, il la trouve à Labastide du Vert, au haut d'une colline qui domine la rivière. Il fera construire, plus haut sur la pente, un atelier à l'allure de pigeonnier. D'innombrables tableaux exaltant la nature et la vie paisible de ce petit village dans la lumière du Lot témoignent de l'enthousiasme du peintre : son jardin qu'il aménage en parterres fleuris, bassins et pergolas, les champs et les arbres, les vignes, des vues depuis sa propriété vers la vallée animée par les fumées des cheminées, une courbe du Vert, le pont, l'église.
Henri Martin peintre heureux sur le motif
"Je travaille et ceci me rend tout heureux - le temps est beau et le pays admirable. Ce calme, toute cette beauté qui m'environne - ah que c'est délicieux - et comme je renoncerais facilement sans aucun sacrifice aux charmes de Paris si je n'étais obligé d'y vivre pour exécuter mes grands travaux, ici ceci n'étant pas possible étant toujours attiré au dehors de mon atelier".
En avril 1908 il écrit à son ami le peintre Henri Le Sidaner : "Quand tu te décideras à venir dans le Midi, je t'engagerai à choisir cette saison. Les vieilles pierres ont toute leur importance et la pauvreté de la terre toute sa mélancolie. Je te montrerai le pont, l'église, etc. c'est bien autre chose que ton beau coin de l'Oise, mais c'est aussi beau."
Les intempéries ne l'arrêtent pas. A la même saison, en 1925, il écrit à son fils Jacques alors en séjour à Venise pour parfaire sa propre formation de peintre: "Nous avons ici un temps désemparé et je travaille en maugréant contre les difficultés qu'il occasionne" Les peupliers et beaucoup d'autres arbres verdissent, et alors - c'est le départ." Il préfère en effet peindre la nature avant l'explosion des feuillages: "Heureusement que la nature est b... belle et consolante. Je suis cependant très desservi par un temps tellement changeant pluie soleil etc... et puis tout ça déjà très vert tandis que mes toiles en train étaient aux colorations encore hivernales avec quelques lueurs printanières." (à H. Le Sidaner, mars 1936, St Cirq Lapopie)
C'est ainsi qu'il a peint ici l'église de Labastide du Vert, quand les peupliers commencent à peine à pousser le vert tendre des feuilles, dans la lumière du matin. Leurs deux troncs encore bien visibles accompagnent le clocher dans son élan, tandis que le petit prunier et les arbres au tournant de la rue animent l'arrivée vers le pont. Non loin de là, un peu plus haut sur la colline, Henri Martin repose depuis 1943. »
Marie-Anne Martin Destrebecq