Le peintre Joseph INGUIMBERTY (1896-1971)
Un peintre provençal à Hanoï
En 2012, soixante ans après la seule exposition personnelle qui fut consacrée à Joseph Inguimberty à Marseille (galerie Moullot), la galerie Alexis Pentcheff rendait hommage à l’artiste dans une exposition rétrospective : Le Sud de Joseph Inguimberty. Ce projet débuta par une très belle rencontre, celle des enfants du peintre et de Giulia et Alexis Pentcheff. Ils publient par la suite la première monographie de l’artiste sous la direction de Giulia Pentcheff, un ouvrage de référence pour tous les amateurs et collectionneurs, qui contribua à mieux appréhender les complexités, les caractéristiques et le développement de la peinture de l'artiste tout au long de la carrière. Depuis, la galerie a été très impliquée dans la représentation internationale de Joseph Inguimberty et a travaillé avec de nombreux collectionneurs et institutions muséales en Europe et en Asie. Ces publications et évènements ont pour but de réconcilier les deux aspects de la carrière du peintre, sa production indochinoise et sa production française, afin de mettre en lumière les singularités et l’importance de son travail au sein de la production artistique occidentale et asiatique au XXème siècle.
Né dans le sud de la France, Joseph Inguimberty arrive en Indochine dans les années 1920 avec une perception de l’art acquise à travers son éducation occidentale. Cependant, le peintre démontre rapidement une profonde fascination pour ces nouveaux paysages flamboyants, leur planéité et l’atmosphère chaude et humide du Tonkin. Dans cette région, Inguimberty approche son art de manière résolument nouvelle, en intégrant ce qu’il découvre en Asie à son parcours occidental.
En professeur, le peintre pousse ses étudiants à expérimenter diverses techniques, notamment celle de la laque et les encourage à ne jamais se satisfaire de leurs résultats. En 1929, Joseph Inguimberty connaît sa première exposition personnelle à l’Imprimerie d’Extrême Orient à Hanoï où le Gouvernement Central d’Indochine achète plusieurs de ses tableaux.
Par la suite, ses œuvres seront conservées dans de nombreux musées, dont le Musée des Beaux-Arts de Marseille, le Quai Branly, le Musée d’Histoire de Marseille et le Centre Pompidou.
Le retour de Joseph Inguimberty en Provence
Quand Joseph Inguimberty se voit contraint de rentrer en France en 1946 pendant la Seconde Guerre Mondiale, il est un artiste accompli. Il produit alors un tout nouveau corpus d’œuvres, influencé par les paysages et l’atmosphère éclatante du Sud de la France. Cependant, son expérience vietnamienne reste omniprésente dans ses toiles. En 1952, les marseillais découvrent l’œuvre de cet artiste tout aussi surprenant que fascinant à la galerie Moullot. Ébahis devant son interprétation poétique de la réalité et son approche singulière, ils le surnomment le « Renoir Vietnamien ».
Extrait du catalogue de l'exposition consacrée à l'artiste par la galerie en 2012
"Comme il l’avait fait à Marseille pour étudier le travail des dockers, s’échinant à décortiquer le mouvement pour mieux le comprendre, Inguimberty étudie scientifiquement le paysage. Il l’appréhende dans toute sa complexité afin de pouvoir le restituer dans la plus grande simplicité. Pour lui, cette simplification des formes n’est pas innée, elle suppose l’effort de se débarrasser d’une partie au moins de ce qui lui a été enseigné. Tandis que ses élèves vietnamiens apprennent à construire l’espace à l’occidentale, lui désapprend la rigueur de cette conception. Et cela il ne peut le faire qu’au prix d’une observation poussée à l’extrême. Si le dessin s’estompe dans le tableau final, c’est que son intérêt a depuis longtemps été épuisé, affadi par les nombreuses esquisses, il est sacrifié à la plénitude de la composition. Tout ce qui sous-tend la composition, tout ce qui est indispensable à sa construction, c’est à dire les étapes préalables, disparaissent derrière l’effet que le peintre souhaite rendre. La charpente s’efface. C’est ainsi que par le plus lent, le plus tortueux chemin, il parvient à atteindre la simplicité. L’essentiel est dit en peu de formes."
Giulia Pentcheff, Joseph Inguimberty, 2012